Perché à 732 mètres d’altitude sur les hauteurs de Beit Mery, à seulement 17 km de Beyrouth, le site de Deir el-Qalaa révèle des siècles d’histoire superposée. Étudié en profondeur par les chercheurs Julien Aliquot et Lévon Nordiguian, ce complexe archéologique offre un aperçu précieux de la vie religieuse et civique dans la Phénicie romaine et byzantine.
À l’origine dédié à Jupiter Balmarcod, une divinité locale plus tard assimilée au Jupiter romain, le sanctuaire semble avoir eu une importance cultuelle bien avant l’époque romaine, peut-être dès les périodes phénicienne et hellénistique. Même si les preuves archéologiques pour ces premières phases restent rares, l’évolution du site au fil des siècles est indéniable.
Entre le Ier et le VIIe siècle de notre ère, Deir el-Qalaa se développe en un complexe rural structuré. En plus du temple principal, on y trouvait un temple plus modeste dédié à Junon Regina, des thermes, une agglomération villageoise et des nécropoles. Au Ve ou VIe siècle, une basilique chrétienne est construite directement au-dessus des anciens bains, avec une particularité rare : un second chœur réservé aux membres du clergé, signe d’une influence chrétienne grandissante.
Le nom Deir el-Qalaa, qui signifie « le monastère de la forteresse », fait référence au monastère Saint-Jean-Baptiste bâti au XVIIIe siècle sur les ruines antiques. Au fil du temps, le lieu devient un sanctuaire civique où les habitants de Beyrouth et des environs venaient rendre hommage aux empereurs romains, aux divinités de Berytus et de Baalbek, ainsi qu’aux dieux locaux.
Malgré des périodes de négligence — notamment durant l’occupation du site par l’armée syrienne entre 1990 et 2005 — Deir el-Qalaa a bénéficié d’importants travaux de restauration. Aujourd’hui, il témoigne de la transition entre rites païens, culte impérial et christianisation de la région — une histoire inscrite dans ses pierres.